Analgésiques morphiniques :opioïdes

7 January 2012

Origine des opioïdes. La morphine est un alcaloïde de l'opium. L'opium contient, à côté de la morphine, d'autres alcaloïdes qui ne sont pas analgésiques tel par ex. la papavérine une substance spasmolytique. Tous les dérivés semisynthétiques (ex. hydromorphone) ou complètement synthétiques (ex. pentacozine, péthydine, L-méthadone, fentanyl) qui possèdent les propriétés analgésiques de la morphine, seront baptisés opioïdes. L'effet analgésique des opioïdes exogènes est lié à leur affinité pour des récepteurs destinés à fixer les opioïdes endogènes, propres à l'organisme, (enképhaline, β-endorphine, dynorphine). Les récepteurs des opioïdes sont présents à la surface des cellules nerveuses. Ils sont présents dans différentes zones du cerveau et dans la moelle épinière, mais aussi dans les plexus nerveux du tractus gastro-intestinal et de la vessie, dont ils contrôlent la motilité.

Il existe plusieurs types de récepteurs des opioïdes (μ, κ et δ) par l'intermédiaire desquels sont médiés des effets différents. Tous appartiennent aux récepteurs couplés à une protéine G.

Opioïdes endogènes

Ce sont des peptides dérivés de précurseurs, proenképhaline, proopiomélanocortine et prodynorphine par protéolyse. Ils contiennent tous la séquence en acides aminés des pentapeptides Met et Leuenkephaline.

Les effets des opioïdes peuvent être complètement bloqués par des antagonistes, (ex. la naloxone) (exception, la buprénorphine).

Mode d'action des opioïdes

La majeure partie des cellules nerveuses réagit aux opioïdes par une hyperpolarisation (augmentation de la perméabilité au potassium). L'influx de calcium qui se produit dans la cellule nerveuse au cours d'une excitation est diminué, réduisant de ce fait la libération de neurotransmetteurs excitateurs et la transmission synaptique. Cette inhibition peut se manifester, selon les territoires nerveux, aussi bien sur des effets stimulants que sur des effets inhibiteurs.

Effet des opioïdes

L'effet analgésique est basé sur des effets au niveau de la moelle épinière (inhibition de la conduction douloureuse) et du cerveau (atténuation de la propagation des influx, inhibition de la perception de la douleur). L'attention et la capacité de concentration sont diminuées.

La direction vers laquelle évolue l'état d'esprit du patient dépend du résultat final. A côté du soulagement associé à la disparition d'une forte douleur survient, en particulier dans le cas d'une injection intraveineuse, et également lors de l'arrivée rapide de la molécule, une sensation de bien être et de légèreté (euphorie). Le désir d'atteindre de nouveau cet état en répétant l'administration d'opioïde, peut devenir trop fort : développement d'une dépendance. Au moment où l'on désire terminer une administration régulière apparaissent des symptômes de sevrage physique (entre autres troubles circulatoires) ou psychique (agitation, angoisse, dépression). Les opioïdes remplissent donc les critères d'un produit générant une toxicomanie : dépendance psychique et physique ainsi que besoin d'augmenter la dose. La prescription de la plupart des opioïdes obéit à des règlements particuliers (tableau des stupéfiants). L'ordonnance précise, entre autres, les doses maximales (dose individuelle, quantité maximale journalière, quantité maximale prescrite). Les ordonnances sont rédigées sur des carnets à souches qui doivent être remplis selon des règles imposées. Des analgésiques opioïdes moins actifs comme la codéine et le tramadol peuvent être prescrits de façon normale car le risque de dépendance est faible.

Les différences entre les opioïdes en ce qui concerne leur activité et leur capacité à susciter une dépendance, peuvent reposer sur des différences d'affinité et d'activité intrinsèque vis-àvis de chaque sous-type de récepteurs. Une substance peut ne pas agir de façon identique comme agoniste ou antagoniste sur les différents sous-types, mais peut se comporter comme un agoniste sur un sous-type donné et comme un agoniste partiel / antagoniste sur un autre ou encore comme un pur antagoniste. Le danger d'une paralysie des centres respiratoires en cas de surdosage existe pour tous les analgésiques opioïdes puissants. L'importance d'une possible inhibition du centre respiratoire est plus faible pour des substances agissant sur les récepteurs des opioïdes comme des agonistes partiels / antagonistes (pentazocine, nalbuphine).

Le blocage de la toux par le biais de l'inhibition du centre de la toux, peut être obtenu de façon indépendante des effets analgésiques ou de l'action sur le centre respiratoire (antitussifs : codéine, noscapine).

Les vomissements observés lors de la première administration des opioïdes sont la suite d'une stimulation des chémorécepteurs de l'area postrema. L'effet émétique disparaît au cours d'un usage régulier, parce que s'établit alors un blocage direct du centre du vomissement.

Les opiacés provoquent par une stimulation de la partie parasympathique des noyaux oculomoteurs (noyau de Edinger-Westphal) une dilatation des pupilles (myosis).

Les effets périphériques touchent la motilité et le tonus des muscles lisses du tractus digestif, les mouvements pendulaires de l'intestin sont renforcés, les mouvements vers l'avant sont inhibés.

Le tonus du sphincter anal est fortement augmenté (constipation spastique). L'effet anti-diarrhéique est utilisé sur le plan thérapeutique : lopéramide. La vidange de l'estomac est ralentie (spasme du pylore), et l'écoulement de la bile et du suc pancréatique est bloqué, car là aussi les sphincters sont contractés. Le fonctionnement de la vessie est également affecté, en particulier la vidange de la vessie est bloquée par suite de l'augmentation du tonus des muscles du sphincter.

Utilisation

La morphine peut être administrée per os, par voie parentérale ou, au niveau de la moelle épinière, par voie épidurale. L'héroïne et le fentanyï sont tellement lipophiles qu'ils parviennent très rapidement au SNC. Le fentanyl est en plus tellement actif, qu'il peut être utilisé sous forme d'un emplâtre sur la peau.

Lors d'une utilisation abusive, le produit (en général l'héroïne = diacétylmorphine) sera injecté pour obtenir un afflux aussi rapide que possible du produit actif dans le ceneau. Vraisemblablement, l'effet psychique recherché est dans ce cas particulièrement intense. Dans ces utilisations abusives, des sites d'administration inhabituels ont été et sont utilisés : l'opium peut être fumé, l'héroïne peut être prisée.

Métabolisme

La morphine, comme les autres opioïdes comportant un groupement hydroxyle libre, sera éliminée par le rein sous forme conjuguée à un glucuronide. Contrairement à la glucuronidation sur l'hydroxyle 3, celle sur le groupement OH en 6 ne diminue pas l'affinité de la molécule. La contribution apportée par le 6 glucuronide à l'effet analgésique est difficile à évaluer avec précision. L'activité de ce composé polaire doit en tout cas être prise en compte lors d'une altération des fonctions rénales (diminution de la dose ou allongement des intervalles entre les doses).

Développement d'une tolérance

Lors d'une administration répétée d'opioides il peut apparaître pour les effets centraux un phénomène d'accoutumance (tolérance accrue) : au cours d'un traitement, il faudra des doses croissantes pour parvenir à une même atténuation de la douleur. Les effets périphériques ne sont pas affectés par ce phénomène de tolérance, de sorte que la constipation peut dans certaines circonstances, lors d'une administration de longue durée, imposer l'arrêt d'un traitement antidouleur indispensable. Il est donc nécessaire, au cours d'un traitement de longue durée par les Opioïdes, d'utiliser à titre prophylactique, des moyens diététiques ou pharmacologiques pour empêcher la constipation.

Antagonistes ou agonistes partiels de la morphine

L'effet des Opioïdes peut être inhibé par des antagonistes, naloxone ou naltrexone, indépendamment du type de récepteur mis en jeu. Administrés seuls, ils n'ont aucun effet chez des individus normaux, mais leur administration peut déclencher les symptômes du manque chez des gens dépendants de l'opium. Compte tenu de son élimination présystémique rapide, la naloxone ne peut être utilisée que par voie parentérale. La naltrexone est métaboliquement plus stable et sera utilisée par prise orale. La naloxone sert d'antidote dans le cas d'une dépression respiratoire induite par les Opioïdes. Il faut noter qu'elle est éliminée plus rapidement que la plupart des Opioïdes et qu'il faudra donc l'utiliser le cas échéant de façon répétée. La naltrexone peut être employée pour l'entretien d'un traitement de désintoxication.

La buprénorphine se comporte Comme un agoniste partiel / antagoniste sur les récepteurs . La pentazocine est un antagoniste des récepteurs et un agoniste K. Avec ces produits il n'est pas possible d'atteindre le même effet analgésique maximum qu'avec la morphine ou la péthidine. L'effet antagoniste des antagonistes partiels peut lors du passage à un agoniste complet bloquer tout d'abord l'action de celui-ci.

Il n'est pas possible d'antagoniser une intoxication à la buprénorphine, car elle ne se dissocie que très lentement des récepteurs aux Opioïdes et, de plus, l'occupation des récepteurs par un antagoniste ne se produit pas aussi rapidement que la situation clinique l'exigerait.